L’attention et l’affection que je porte à mon corps ont beaucoup fluctué au fil du temps. Mon rapport à lui a toujours été soit inexistant, soit très compliqué.

Ceci est un poème de début d’Automne 2018, mais j’ai eu envie de le partager, car il est représentatif de nombreuses années :

Distante de quelques dizaines de centimètres, elle m’observe.
Étonnée, incrédule, elle copie le moindre de mes gestes.
Cette inconnue qui me fait face me dérange, me répugne, m’énerve..
A fleur de peau, mon cœur murmure  » je la déteste « .
L‘image qu’elle me projette n’est pas celle que je connais.
A qui donc est ce corps qui me semble étranger ?
Gardant mon calme, je m’obstine, je l’affronte, les larmes aux yeux.
Et pourtant c’est bien moi, la fille du miroir, qui me ressemble si peu.

Celui-ci, en revanche, est récent. Il correspond à une révélation que j’avais déjà eue, mais dont je n’ai pris la mesure que récemment :

Ce corps est le chariot de mon âme sur le chemin de la vie
Outils des sens et de l’esprit, il ressent à l’infini
Rivage de l’interface avec autrui, il m’ancre ici
Puissant et fragile petit abri, je veux prendre soin de lui
Si son image me contrarie, puis-je me rappeler tout ce qu’il a subi.

Depuis quelques années, j’ai essayé de mieux « m’entendre » avec mon corps, notamment en ne le maltraitant plus et en lui témoignant de la reconnaissance pour tout ce qu’il rend possible.
J’ai la chance d’avoir un corps complet, et en relative bonne santé. Ce n’est pas un acquis ni un dû, c’est un cadeau quotidien… et il est bien rude d’en demander davantage sans pleinement considérer cela.

Pour autant, c’est seulement depuis assez peu que j’arrive à affronter le « décalage » qui lui est lié, celui qui concerne son image : car je ne me vois ni ne me sens pas telle que me reflète le miroir, et c’est très très perturbant.

J’ai mis longtemps à accepter mon corps, et le fait qu’il avait évolué sans moi, sans que je ne le vois. Je lui en ai voulu, alors que j’avais moi-même évolué « sans lui », en l’ignorant totalement, et qu’il a fait ce qu’il a pu pour suivre. Il n’a fait que s’adapter, et vivre avec mon rejet de son image. Il a continué à me porter, quand bien même je m’en dissociais…

Aujourd’hui, je veux faire un pas de plus vers une Paix durable avec lui. Avec « nous ». Car que je le réalise ou non, je suis ce corps.
Il est moi, mon existence dans ce monde, la partie qui encaisse les dures réalités physiques, qui abrite mon esprit. Ce n’est toujours pas facile de le considérer comme mon « meilleur ami », mais je m’y emploie, petit à petit.. et j’essaie de le réinvestir.

Je pense que cela fonctionne plutôt pas mal, tout doucement, il guérit. Notre relation n’est pas encore parfaite, mais on avance de concert. Tant qu’il a la santé, je n’ai pas à me plaindre.

Car c’est pourtant si fragile un corps. Alors quand on y pense, à tout ce qu’un corps nous offre en termes de possibilités, quand on songe à tout ce qu’il est capable d’endurer sans lâcher totalement, et à quel point il lui est permis de se régénérer… C’est juste incroyable, et digne d’admiration, non ?

Aujourd’hui, je vous propose quelque chose : ayez une pensée consciente pour lui, et demandez vous la dernière chose que vous ayez faite pour prendre soin de lui. Moi en tout cas, c’est ce que je vais faire =)

Jolie journée à tous, et à bientôt !

2 Comments

  • Nath dit :

    Salut!

    Très émouvant ces poèmes, et très parlant. Je crois qu’on est assez nombreuses à avoir cette sensation de décalage, que ce soit sous la pression sociale ou quelque chose de plus intime. Pour ma part c’est avec mon visage que j’ai du mal (j’ai toujours été plutôt neutre vis à vis du reste de mon corps). Encore aujourd’hui je n’arrive toujours pas à me débarrasser des cette foutue dermatilomanie (cette manie de se tirer les points noirs invisibles pour les autres, et de se faire plein de cicatrices bien visibles au passage..).

    Des bisous!!!

    Nath

    • MGraph dit :

      Coucou Nath,
      Merci beaucoup =)
      Oui, à force d’invectives dans tous les sens, les femmes ne sont pas aidées avec l’image de leur corps. J’imagine que te dire à quel point tu es jolie ne t’aidera guère, mais c’est le cas, et tu as toute ma compassion pour affronter la chose !! (j’ai appris un mot, je ne connaissais pas la dermatilomanie !)
      Pour ma part, en plus du décalage d’image, j’ai la sensation de ne pas ressentir mon corps, c’est compliqué à expliquer x) mais je progresse 😉
      Gros bisous la belle ! Merci de tes visites régulières et de tes gentils commentaires ! ♥

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