Si je devais résumer le Sentiment qui m’a le plus habitée tout au long de ma vie, je le ferais avec ce mot : « Différente ».
Aussi vague qu’il soit, il est celui qui me définit le mieux, celui dans lequel je me retrouve le plus. Le seul aussi, peut-être.
D’aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours eu ce sentiment d’être un « alien », une « anomalie ». Quelque chose qui n’était là que par hasard, par erreur. Cette sensation qui picote l’âme, comme si je m’étais trompée d’époque, trompée de planète, trompée d’espèce, trompée de genre parfois aussi. . . comme si ce Monde n’était tout simplement pas le mien.
Je suis une étrangère dans un Monde qui marche sur la tête.
Une goutte d’eau qui cherche le Soleil au milieu de l’Océan.
Où que j’aille, où que je regarde, je ne me retrouve dans rien, ou si peu.
Les cases ne sont pas faites pour moi (le sont elles seulement pour quiconque ?), et ma vision du monde tient à mes propres filtres, que j’ai plus ou moins choisis. Elle et moi, on « est »… mais comment nous définir ?
Les mots que les autres posent sur moi me semblent la plupart du temps hors de propos. Nous n’avons pas le même point de vue, pas la même image, et même sans cela, nous manquons de vocabulaire. Il faut dire que les dictionnaires sont épais car il faut des milliers de mots pour exprimer une personne, et pourtant, il manque encore bien des pages.
Toujours la tête dans les nuages, l’Esprit dans la Lune, et l’Âme parmi les étoiles,
j’ai pourtant les pieds sur Terre, bien trop consciente parfois de ce qui m’entoure.
Mes pensées fusent en tous sens à chaque seconde. Elles ne s’arrêtent que le temps que j’accorde à mes passions ou le temps d’un émerveillement, pour repartir aussitôt de plus belle. Elles sont un puissant maelström sans fin qui bouillonne quasiment en permanence, un in-maîtrisable tsunami de concepts, de questions, de mots, d’images, d’émotions, de perceptions, de souvenirs, de spéculations, de rêves…
Cela me rend difficile à suivre, et difficile à ‘captiver’. Je reste difficilement concentrée sur autre chose que ce qui me plaît, et je n’enregistre pas toujours très bien les infos qu’on me donne (d’où notamment la présence chez moi de mémos partout et le besoin vital d’un agenda x) et pourtant globalement j’ai une bonne mémoire).
Et puis il y a ce côté ‘à fleur de peau’ chez moi. Je vis mes émotions de façon assez intense (et parfois à retardement). Aussi, je doute sans cesse de tout, suis facilement dépassée ou découragée, mais pour autant, je ne lâche jamais réellement le morceau et me révèle assez opiniâtre. D’ailleurs, des paradoxes comme celui-ci, j’en fais ‘collection’…
J’admets que déjà rien que cela puisse être pénible pour la personne en face de moi. Mais à mon sens, ce n’est pas ce qui pêche le plus.
Le principal problème que je rencontre, c’est la communication.
Je l’avais déjà vaguement évoqué dans un précédent article et légèrement développé dans un autre, mais « parler » est très compliqué pour moi, pour une multitude de raisons.
La principale, c’est que je n’ai de contrôle que sur une chose à la fois : soit je maîtrise mes pensées et suis en capacité d’analyser, soit je parle et tout vole en éclats.
Pourquoi ? Déjà parce que la société a des tas de codes incongrus qu’il faut appliquer et qui rendent les conversations trop complexes : Entre ce qui « ne se dit pas » même si c’est la vérité, ce qu’il faut enrober dans trois tonnes de détours inutiles, ce qu’on doit deviner ou que « n’importe qui aurait pu comprendre », etc… Sans compter qu’un refus est toujours mal perçu, même si cela n’a rien à voir avec notre interlocuteur. Pour moi, c’est juste n’importe quoi.
En temps normal, j’ai également une propension à être tatillonne sur les mots et un peu ‘cash’. J’ai tendance à vouloir m’assurer régulièrement que j’ai bien compris ce que vous vouliez dire, et que de votre côté vous allez bien comprendre mon propos et les mots que j’emploie… sauf qu’à l’oral, je n’ai pas le temps de bien choisir les mots ni même d’analyser ce que vous me dites, et cela va trop vite pour moi.
Ajoutons à cela que lorsque je parle, j’essaie de prendre en compte tout ce que j’ai appris à traiter, et ça devient un gros bazar dans ma tête : faire des phrases construites et accessibles sans trop tarder à répondre, essayer d’utiliser les bons mots, manifester de l’intérêt « visible » pour la conversation, penser à regarder dans les yeux, essayer d’y voir une trace d’émotion qui indiquerait si je saoule la personne en face, guetter les signes qui me disent quand je dois la fermer ou pas, ne pas trop utiliser les mains, cesser mes mouvements machinaux, éviter les carambolages de mots, etc, etc.
Et le problème, c’est que bien souvent, je n’y arrive pas. Mais alors pas du tout. C’est juste « trop » pour moi.
Je lutte pour rester concentrée et je suis envahie de pensées. Alors, je me retrouve impuissante face au flot de paroles qui jaillit de ma bouche – soit parce que je suis passionnée et que donc vous n’aurez pas l’occasion d’en placer une (et après j’ai honte de mon comportement), soit parce que je suis paniquée à l’idée de *devoir* parler et que je perds tout contrôle de la situation, jusqu’à oublier de respirer normalement… Là je me mets à parler plus fort, et plus vite…et c’est parti.
Le moindre son, même ma propre voix, devient du « Bruit » (ce qui m’a toujours fait perdre mes repères, c’est presque un supplice). De même, je ne vois plus arriver les questions trop « personnelles », et je réponds avant d’avoir eu le temps de me dire « non, je ne veux pas répondre », le stress monte d’un cran, je me sens acculée, tout devient « intrusion », et je lutte alors aussi pour ne pas repousser l’Autre, car je sais que pour lui, poser ce genre de questions est normal… même si moi je ne le supporte que très mal – Et plus je lutte, plus je deviens agressive ou faussement euphorique malgré moi. Je me mets à totalement paniquer, et je n’ai plus qu’une envie : fuir, et aller pleurer dans un coin.
Je mets des heures, littéralement, pour me rasséréner après une « discussion » mal vécue.
Et il me faut parfois des jours entiers pour récupérer de l’énergie derrière.
Alors, heureusement pour moi, j’ai quand même appris au fil des années à « faire la conversation » un minimum, mais cela reste coûteux et compliqué avec de (très) nombreuses personnes. C’est plus simple avec les proches dont je sais qu’ils ne se formaliseront de rien, parce que je n’ai pas besoin de contrôler quoi que ce soit ou si peu. Ils me diront les choses directement et simplement au besoin, et je pourrais corriger le problème. Ce n’est pas le cas avec les autres hélas, même si globalement, je fais tout pour faire ‘bonne figure’ (ce qui est encore plus coûteux, mais fait moins de vagues).
Pour éviter tout cela, je préfère être seule, ou alors demeurer en silence dans un coin des pièces où je suis. Je suis plus « présente » aujourd’hui qu’avant, mais je reste souvent à regarder les gens sourire et à écouter la conversation en cours s’il y en a une (et une seule – s’il y en a plusieurs, en général, vous me perdez).
Depuis ma bulle, j’observe le monde, depuis toujours. En retrait. Comme un fantôme.
Je vis à côté de moi, et à côté des autres. Spectatrice de la Vie et auditrice de ses mélodies. En fait, je ne vis que dans ma tête, mon Univers à moi, là où j’exerce un semblant de maîtrise sur quelque chose, et le seul, souvent, où je me sens à ma place. Nombreux sont ceux qui ont trouvé ça « bizarre » ou « ridicule » au fil du temps. Pourtant c’est simple :
Dans l’intimité de mon esprit, je suis Libre.
De mes yeux de petite fille à mes yeux d’adulte, c’est le Monde extérieur qui m’a toujours semblé étrange. J’ai du mal à le saisir, et même à l’atteindre. Il est si proche et si lointain à la fois.
Même si le monde entier ou presque semble tomber d’accord sur le fait que le problème vient de moi, je ne vois pas où je me trompe, ni comment, ni pourquoi. Je ne vois pas ce que je fais ‘mal’.
C’est sans doute un peu orgueilleux, mais mon monde à moi m’a toujours semblé plus logique, plus Juste, plus simple, plus « tel qu’il devrait être »…
Je sais bien que je ne peux pas continuer à toujours vivre hors du Monde « Réel », mais il y a toujours un gouffre entre lui et moi.
J’ai essayé de le comprendre, véritablement. Depuis toute petite, j’essaie régulièrement de lui « tendre la main ». Pendant longtemps, j’ai même essayé de me ‘changer’ pour mieux m’intégrer, parce que j’avais fini par croire que c’était vraiment moi le problème.. que c’était à moi de faire tout le chemin..
J’ai souvent dû lutter contre mes émotions, et contre et mes perceptions. J’ai repoussé mes envies, et mes limites (principalement ma résistance aux stimulis extérieurs tels que le bruit ou ma tolérance pour la proximité physique). J’ai caché mes « bizarreries », mes « inacceptables » aux yeux du monde. Tous ces dénis se sont entassés jusqu’à former cet immense « trop-plein » qui me faisait sentir horriblement « vide ».
Et cela a finalement débordé, sans que j’y puisse rien, et la vague est revenue s’abattre une fois de plus sur ma route déjà difficilement praticable. J’ai appris ma leçon.
On ne peut pas être quelqu’un d’autre que soi.
On peut seulement chercher à devenir une meilleure version de qui l’on est déjà.
Depuis je ne souhaite plus changer pour le monde, seulement pour moi, et je tente tant bien que mal de reconstituer le puzzle de mon « Moi » effrité au fil du temps.
Qu’est-ce qui m’a toujours appartenu ? Qu’est-ce qui est le fruit de ce que la Vie a brisé ? Des années que je m’analyse avec du soutien, et que je repositionne mon être. Aujourd’hui je me sens plus légère, plus complète, mais toujours pas entière, et toujours « à côté ». Toujours « Différente ».
C’est aussi compliqué pour moi que pour les autres. Déchirée entre la partie de moi qui retourne à la source, et celle qui, dans la direction opposée, continue d’avancer vers vous. J’affronte les contradictions de l’Autre, que je ne comprends pas, et j’enchaîne les miennes, dont je me sens prisonnière. Et vice-et-versa.
Autrefois j’ai gommé tant de moi-même pour être « moins différente », sculptant le paraître à l’excès, créant tant d’automatismes, portant tellement de masques, qu’aujourd’hui encore, j’ai parfois du mal à savoir qui je suis.
Tout ça pour tenter de vivre « avec » le Monde, sans y parvenir… J’ai dépensé tellement d’énergie dans ce but… sans jamais obtenir le résultat escompté. Ce monde me reste incompréhensible la majeure partie du temps, et je ne m’y sens pas à ma place.
Aujourd’hui, si on m’enlevait mes quelques repères, les quelques personnes qui sont vraiment « là pour moi », je serais pratiquement aussi paumée qu’avant.
A force d’entendre certaines choses et d’en ressentir d’autres, je me suis souvent demandée « Suis-je ‘anormale’ ? ».
On pourrait débattre des heures durant de ce qu’est la « Normalité » – un mot que je n’aime pas particulièrement du reste, il veut tout et rien dire, mais on saisit l’idée -. Qu’est-ce qui ne tourne pas rond chez moi ? Qu’est-ce qui ne fonctionne pas comme tout le monde ?? J’ai beau chercher, je ne trouve pas de réponse…
Pourtant, à la base, je suis comme vous tous, et je n’ai rien contre ce Monde. Je n’y suis juste « pas adaptée ». Est-ce un crime ? Ce n’est pas parce que je suis très bien avec moi-même que je refuse d’établir des liens avec d’autres êtres vivants ou que je ne les aime pas. Seulement j’ai tendance à le faire à ma façon (un peu ‘chaotique’), à mon rythme (fortement variable), selon mes valeurs, mes humeurs, mes coups de coeur…
C’est un peu plus facile avec les très jeunes enfants, ou parfois avec les animaux de compagnie. Je crois qu’on se comprend mieux, ou qu’on fonctionne un peu pareil : simplement, sans détour, sans mauvaise intention… Avec les autres, surtout avec les « adultes », c’est plus compliqué. Et contrairement à ce que l’on me reproche, ce n’est pas faute de Volonté, du moins de mon côté.
Depuis très jeune, j’ai lu et observé, expérimenté et analysé, corrigé et appliqué.
Lorsque je ne fuyais pas le monde, j’ai vécu mon simulacre de Vie comme un scientifique de l’Existence.
Le genre de scientifique un peu fou qui est son propre cobaye. Il teste toutes les approches possibles, soigne les archives de ses études empiriques et adapte ses méthodes…
J’ai remis en question mon Monde et le votre, notre Univers tout entier, moi-même inclue, et souvent. J’ai exploré le champ des possibles et cherché des indices, pour tenter d’y voir plus clair dans mon sentiment de décalage entre le ‘vrai’ Monde et moi, dans cette sensation de ‘désappartenance’, et de distance d’avec le Réel et ses codes. Afin de créer un pont entre nous, ou à défaut, un camouflage parfait..
J’ai tant appris par cœur. Autant que je pouvais emmagasiner dans ma petite tête, et bien plus que je ne me serais jamais crue capable d’enregistrer, mais une vie ne suffirait pas à tout intégrer… Le valable, le non valable, et aux yeux de qui. Le « Bien », et le « Mal ». Les émotions, et leurs expressions. Les sens cachés, et les degrés. Les mots, et les sourires, les regards, et les gestes. Les tenues, et les attitudes. Les priorités, les attentes aussi… La liste est longue, et tout reste relatif.
Au final, j’ai bien compris que tout n’était pas binaire, « oui/non », « ok/pas ok ». J’ai appris les nuances, la multitude de couleurs. J’ai appris à aimer cet arc-en-ciel de teintes et demi-teintes qui rendent le Monde plus riche encore, même s’il nous le complique au passage, et que chacun perçoit à travers ses propres filtres. J’ai accepté qu’un même mot peut avoir plusieurs sens, et que ce que l’on dit (comme ce qui en est compris) n’est pas forcément ce que l’on souhaitait exprimer. J’ai pris énormément de recul sur beaucoup de choses.
Mais c’est tout. Je ne me sens pas moins « hors contexte » qu’avant, et pas plus à l’aise. C’en est désespérant.
Alors le plus souvent, je reste seule dans mon coin. Il est toujours plus commode de choisir la facilité.
Seule tout est plus simple. Je me laisse être car je n’ai à me soucier de rien ni de personne. Pas moyen que je blesse ou dérange, et donc pas besoin de faire attention à ce que je dis, fais, ou suis. « Faire » et « Être » vont ensemble ici. Tout y est vrai. Pas de « Bien » ou de « Mal » puisque je n’agis ni « pour » ni « contre ». Pas de prix à payer pour être soi, pour être différent. Pas de honte à avoir de mes « excès d’émotions » provoqués par « trois fois rien »…
Dans mon monde, je suis intégrée sans avoir à renier des parties de moi, ou à réfléchir à des milliers de paramètres aléatoires à prendre en compte…
Dans le vrai Monde…. je ne veux pas faire de vague, mais je ne veux pas non plus me perdre ou me noyer… Comment faire, quand je ne peux être « moi » sans y réfléchir que lorsque je suis dans ma bulle ?? J’essaie de m’aider de mes retours d’expériences : j’analyse la situation autant que possible avant de m’y impliquer. Histoire de savoir où je mets le pied…
On m’a souvent dit « arrête de chercher à comprendre. ». Mais c’est impossible pour moi. En dehors de mon monde, j’ai besoin d’éléments pour me guider.
Je sais que chaque personne est unique, qu’il n’est pas obligatoire de comprendre pour accepter un Être avec ses particularités, et ça, ça me plaît. Seulement cela ne marche que pour l’ « être ».
Parce que pour ce qui est de « Faire » les choses, comme mes théorèmes de Mathématiques, je ne vois pas de raison d’appliquer quoi que ce soit sans avoir d’abord compris « comment » et « pourquoi »…
Alors je cherche ou je demande les explications dont j’ai besoin, parce que oui, j’ai besoin qu’on m’explique un peu toujours tout, et c’est vrai, parfois il faut m’expliquer plusieurs fois – pour diverses raisons –, et de différentes façons (J’ai toujours été un peu longue à la détente, bien malgré moi je vous assure). C’est nécessaire pour que je puisse m’adapter, puisqu’on me demande plus souvent de « faire » ceci ou cela que d’ « être » moi-même.
La plupart des gens l’ont oublié, il ne s’en rendent même pas compte… mais ils ne se voient plus les uns les autres. Ils ont des idées qu’ils se projettent et auxquelles ils s’attendent à ce que l’on se conforme pour ne pas être obligés d’ajuster l’image et le son. Parfois, j’ai l’impression que le monde entier « regarde la télévision ». Moi je préfère regarder par la fenêtre… Ce n’est pas encore tout à fait la Rencontre, mais au moins, c’est une ouverture vers son possible.
Depuis ma fenêtre, chaque jour je fais les tentatives que je peux avec le courage dont je dispose pour cette tâche ardue. Chaque jour j’annote mes archives mentales et je mets à jour ma base de données : j’ajuste ma configuration. Chaque jour, je suis lasse et fatiguée, parce que sortir de ma Bulle constitue une dépense d’énergie quotidienne immense, et que cela m’épuise, parfois bien au-delà des mots. Au point que souvent, si j’ai trop forcé ou que je me suis laissée dépasser, en plus de ressentir une détresse morale, les répercussions sont physiques. Chaque jour, j’ai cette sensation que je vais finir par laisser tomber…
Pourtant, je continue, car au fil du temps, il y a quand même eu de petits et grands « Miracles » qui en valaient la peine, et aussi parce que
je suis « la Pessimiste la plus optimiste du monde », que je suis têtue, et que j’ai encore envie d’y croire.
Y croire. Je sais que j’ai souvent ce petit côté un peu ‘naïf’ pour les choses de « la Vie », mais je m’y accroche quand même, parce qu’il fait partie de moi, et que sans lui je n’en serai pas là. C’est cet incorrigible Espoir qui a maintenu une ouverture au Monde réel possible. C’est lui qui m’a permis de rencontrer toutes ces personnes merveilleuses qui sont des étoiles dans mon Ciel (et pour qui j’espère en être une dans le leur).
Ces personnes vers qui, la plupart du temps je n’ai pas fait le moindre « premier pas » conscient, et qui m’ont aidée à parcourir la route vers la Rencontre, afin que l’on s’apprivoise… sans que je comprenne pourquoi ou comment, car je n’avais rien à « faire » pour cela, je n’ai eu qu’à laisser « être » le lien qui se tissait de lui-même… dans un respect mutuel.
Ces personnes à qui je n’exprimerais jamais suffisamment ma Reconnaissance, parce que je ne sais pas le faire, ni le dire, même si mon cœur en déborde. Je ne peux que l’écrire.. J’espère qu’elles savent à quel point elles sont importantes à mes yeux, et à ma vie.
Ce sont elles qui atténuent un peu mon sentiment de ne pas appartenir à ce monde, ni même à cette humanité dans laquelle, bien souvent, je ne me reconnais pas. Elles aussi qui m’ancrent dans le réel et donnent de la consistance à mon Existence diaphane. Elles enfin qui ont permis d’adoucir la Douleur qui découlait de cette discordance.
Car, au fond aujourd’hui, je ne suis pas « malheureuse ». Déçue de ne pas être plus régulièrement comprise ou acceptée, certes, désorientée de ne pas comprendre pourquoi, et très Triste parfois de l’image déformée que l’Autre se fait de moi. Oui, je pleure souvent car je suis peinée de tout ça, mais pas de me sentir différente, plus maintenant en tout cas.
Et à vrai dire, à part lors des « crises », je crois que j’en ai même toujours été presque un peu fière, inconsciemment. Je n’ai jamais voulu changer ça. M’intégrer oui, mais modifier ce qui, à moi, me semblait tellement plus ‘normal’… non.
Je ne suis pas la plus mal lotie. Au final, je ne m’en suis pas si mal sortie.
Et puis j’ai quand même de la Chance. . . Je passe le plus clair de mon temps avec moi-même ou avec mon Prince, et là les choses coulent globalement de source, cela me suffit généralement à aller bien. Notre demeure est mon havre de Paix, notre intimité est ma digue salvatrice sur laquelle ma détresse n’est plus qu’une vague passagère qui va et qui vient. Sans compter mes Amitiés, amarres toujours fidèles, et n’ayant pas peur des mots que l’on pose en couleur, sur papier ou dans le coin d’un ordinateur.
Ce défaut, cette difficulté à communiquer surtout à l’oral, cela reste gênant, pesant, et fatigant (tellement fatiguant !)… mais c’est tout. Enfin, « presque » tout….
Plus le temps passe, plus j’ai comme un sentiment d’urgence qui me tiraille, par moment, qui me hurle de le comprendre… Je ressens le besoin d’expliquer ce décalage. Difficile de laisser pareil mystère sans explications, surtout quand on se l’entend reprocher continuellement.
Je cherche peut-être seulement une justification à mes quasi-inaptitudes sociales et à mes bizarreries, ou à me rassurer sur ma santé mentale. Peut-être. Peut-être pas. Pour moi c’est plus que ça. Beaucoup plus.
Il me manque un morceau. Un vide que je comble par un mot qui me ressemble. Mais que je ne peux toujours pas définir.
Parfois, je voudrais savoir, poser des mots, les vrais mots (s’ils existent), sur cette dissonance dénuée de raison apparente. Pour ne plus me débattre dans le flou. Pour me sentir juste « Moi », et plus seulement « Différente ».